L’apparition du covid-19 en Guinée a empêché la tenue à date de la distribution de masse de médicaments pour l’élimination des maladies tropicales négligées MTN. C’est dans cette optique que le programme national de lutte contre les MTN a mis un plan de relance dans les différentes régions du pays. A Boké les équipes déployées sur le terrain s’est tiré d’affaire malgré les difficultés. Cette campagne annuelle de traitement de masse (TDM) s’est déroulé dans le respect des mesures barrières pour éviter la propagation du coronavirus.
A Boké, les distributions de masse de médicaments contre les MTN devait se tenir au mois de mars 2020 dans neuf préfectures.
D’après docteur Mamadou Kaba chef section de la prévention et lutte contre la maladie, toutes les formalités étaient faites notamment la formation des agents, des plaidoyers au niveau de toutes les collectivités régionales, préfectorales et sous préfectorales pour bien mener la campagne. Malheureusement cela a coïncidé à l’arrivée de la pandémie du coronavirus en Guinée. Compte tenu du contexte, l’autorité nationale a exhorté l’arrêt de la campagne. Ce n’est qu’en fin Août 2020 que la campagne s’est tenue: « Nous avons faits des sensibilisations de masse à tous les niveaux et des plaidoyers où tout le monde était impliqué. Les différents chefs des centres de santé et les distributeurs ont été formés. 992 distributeurs de produits repartis en 542 équipes de distributions. Le niveau national nous a accordé la formation des trieurs et des agents de mobilisation qui étaient plus de 700. Ils ont sillonné toute la préfecture. Nous avons reçu également une dotation en kits composée de gels, bavettes et savons. Les mesures étaient respectées par tout le monde ».
Après l’étape de sensibilisation de la population sur le respect des gestes barrières, la campagne s’est tenue sur une période de sept jours. Selon la population cible, les équipes faisaient le porte à porte. Les personnes âgées de 5 à plus sont les couches éligibles à la campagne, soit 80 % de la population indique le chargé de la prévention et lutte contre la maladie. Il précise que deux individus de même âge qui n’ont pas les mêmes tailles ne reçoivent pas le même nombre de comprimés. Plus on est grand de taille plus on reçoit de comprimés lors de la campagne. 90 cm à 1m20 correspond à 1 comprimés. La campagne visait 430 250 soit 80 pour cent de la population.
A Boké, l’ivermectine 5 mg est donné contre l’Onchocercose et la filariose lymphatique et l’Albendazole contre la géo-helminthiase (vers intestinaux). Certains citoyens sont réticents à la prise des médicaments lors des campagnes. Grâce à l’appui des autorités de la localité ils ont fini par coopérer. Ces réticences qu’ils justifient par le manque d’information à temps car le produit ne se prend pas à jeun. « Donc si tu trouves une personne qui n’a pas déjeuné elle va te refuser sous prétexte qu’elle n’a pas été informée. D’autres c’est à cause de l’accoutrement des agents de santé comme le port de pantalon ».
Ces deux produits peuvent présenter des effets secondaires qui sont entre autres : les vertiges, les troubles visuels, les douleurs abdominales, la diarrhée. La population est préparée aux conduites à tenir en cas d’effets indésirables : « Avant de donner le médicament, on explique à l’intéressé ce produit c’est contre telle maladie et pour le prendre il faut que tu sois dans telle condition. Néanmoins si après la prise tu as les effets secondaires cités plus haut, va dans un centre de santé tu déclares ou appelle l’équipe qui est passée puisqu’ils laissent leurs contacts pour bénéficier gratuitement d’une prise en charge. Les effets secondaires ne sont pas immédiats, le niveau national a mis un petit fonds et une catégorie de médicaments pour faire face aux complications sérieuses. Ya même une ambulance puisque si un cas grave se produit à Sangaredi par exemple et que le centre de santé n’arrivant pas à gérer on n’informe l’hôpital et le médecin formé dans ce sens bouge avec l’ambulance pour chercher la personne afin de l’hospitaliser. La prime du chauffeur, le carburant et la nourriture du malade durant son séjour est assuré par le programme national de lutte contre les MTN. Heureusement nous n’avons pas eu de cas graves ».
La campagne a obéi au respect des gestes barrières. Une fois dans une concession, l’agent se lave les mains avec de l’eau et du savon puis applique la solution hydro alcoolique avant de commencer son travail qui consiste à mettre l’eau dans un seau avec un gobelet.
Ensuite aligner les gens, prendre leur mesure. Toute personne mesurée, prend le gobelet pour ingérer le médicament qui lui a été donné. Et la plupart des familles avait des kits indique docteur Mamadou Kaba. Une liste comportant le nom de chaque famille, âge et sexe est faites pour savoir si l’année prochaine ce sont les mêmes personnes qui seront éligibles où s’il y’aura des nouvelles.
Il ajoute que le retard de distribution de masse de médicaments n’a pas eu d’impact majeur chez les bénéficiaires. Cependant, les agents de santé ont rencontré des difficultés sur le terrain comme l’impossibilité de rallier certains villages pour donner les médicaments à cause de la pluie qui faisait déborder certaines rivières. Conséquence, les villages qui se trouvent derrière ces rivières n’ont pas été couverts vu que la durée était de 6 jours. Mais après la saison hivernale le reste des médicaments a permis au chef de centre d’organiser des séances de rattrapages pour ces villages.
Docteur Mamadou Kaba évoque aussi quelques leçons tirées lors de la distribution masse de médicaments en 2020 à Boké: insuffisance du nombre d’agents affectés sur le terrain vu que le nombre de personnes estimé par les autorités est diffèrent des réalités du terrain. Une équipe composée de deux personnes couvre 100 à 150 personnes par jour. Ya des localités très éloignées où on peut faire 10 à 15 km du A au point B. On lui dit de faire le travail en cinq jours alors que pour un seul village il a fait deux à trois jours. Ces informations sont remontées pour que prochainement on augmente le nombre d’équipes sur le terrain ou le nombre de jours. »
Le chargé de prévention et la lutte contre la maladie au DPS de Boké ne disposait pas sur place de statistiques concernant les cas d’onchocercose et de filariose lymphatique qui peuvent toucher les seins et les pieds des femmes: « Pendant chaque campagne les malades de la filariose lymphatique et d’onchocercose sont recensés et les informations sont remontées au programme pour trouver de nouvelles approches dans leur prise en charge. Le médicament que nous donnons pendant la campagne c’est à titre préventif ».
Comme Boké, la distribution de masse de médicaments pour l’année 2020 ne s’est pas tenue au moment indiqué à cause du covid-19. C’est pourquoi le programme national de lutte contre les MTN a mis en place un plan de relance pour sa tenue dans les différentes régions de la Guinée. Le respect des gestes barrières était de mise. L’objectif vise à éliminer ou contrôler des maladies tropicales négligées (MTN). Elle est organisée une fois par an et est administrée à toute la population éligible (5 ans et plus) du district sanitaire pour les 4 MTN (Filariose lymphatique, Onchocercose, trypanosomiase et le Trachome).
Pour les districts hyper endémiques aux géo-helminthiases il est recommandé de traiter ces districts à l’albendazole deux fois par an souligne docteur Sadan Sidibé chargé de communication du dit programme.: « contre l’onchocercose, Ivermectine comprimé 3 mg -Albendazole comprimé 400mg : contre la filariose lymphatique, le praziquantel comprimé 600 mg : contre la trichonsomiase, l’albendazolecomprimé 400 mg : contre les géohelminthiases, l’azithromycinecomprimé 250mg, Azithromycine sirop 1200mg et la pommade Tétracyclineophtalmique 1% : contre le trachome pour les enfants à partir de 6 mois. »
Dr Sadan précise qu’en dehors du PZQ, les effets secondaires sont rares après la prise de ces médicaments car les produits utilisés sont bien tolérés. En plus ces effets secondaires disparaissent dans les 24 heures après la prise du médicament.
Ces distributions de masse de médicaments sont rendus possibles grâce à l’appui technique et financier de Sightsavers, Helen Keller International (HKI) et Catholique Relief Service (CRS).
Maimouna Bangoura