Infrastructures déplorables, pénurie de personnel, d’équipements et de médicaments : Les pays africains doivent renforcer leurs systèmes de santé pour pouvoir faire face à l’épidémie de coronavirus.
Tunis (dpa) – Les systèmes de santé en Afrique « n’ont pas la capacité pour tenir le coup » en cas d’une « transmission communautaire soutenue » de l’épidémie de coronavirus (Covid-19) dans ce continent, a prévenu l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). « Les pays africains doivent se préparer et pour se préparer, il faut renforcer les systèmes de santé », a souligné l’agence onusienne spécialisée, dans un communiqué publié le 18 mars 2020.
En effet, les systèmes de santé africains ne sont pas en mesure de résister, confrontés à des flambées. Infrastructures en état déplorable, pénurie chronique de personnel, d’équipements et de médicaments, longueur des temps d’attente et coûts élevés des soins : ces systèmes de santé suscitent la frustration de la population et constituent un élément dissuasif pour les médecins.
À titre d’exemple, le continent enregistre une moyenne de deux médecins et 15,5 lits d’hôpital pour 10.000 habitants, d’après un rapport de l’OMS, publié en 2018. Ce rapport a révélé que le système de santé en Afrique ne fonctionne qu’à la moitié de sa pleine capacité.
Selon des chiffres de l’ONU, la part du continent dans les dépenses mondiales de santé est inférieure à un pour cent. Les dépenses nationales de santé représentent un faible pourcentage du produit intérieur brut (PIB) dans la majorité des pays africains. Seuls deux pays, l’Algérie et la Namibie, consacrent plus de cinq pour cent du PIB à la santé, selon la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA).
Paupérisation et pénurie des professionnels de santé
Les dépenses prises en charge par les patients représentent 36 pour cent des dépenses totales de santé en Afrique, avait annoncé, en 2019, le groupe pharmaceutique international GBCHealth. Si elles sont « catastrophiques », ces dépenses provoquent la paupérisation de ménages forcés à vendre leurs biens, à s’endetter ou à déscolariser leurs enfants.
C’est le cas notamment de l’Afrique subsaharienne où les régimes d’assurance-maladie couvrent moins de dix pour cent de la population, selon l’OMS. Touchée par environ 25 pour cent des maladies dans le monde, la région ne dispose que de trois pour cent de l’ensemble mondial des professionnels de santé. Pire encore, cette situation est aggravée par une fuite des cerveaux parmi les professionnels de santé, attirés par des salaires plus élevés et des infrastructures modernes dans les pays riches.
Faute de ressources financières suffisantes, l’Afrique consacre un faible budget au secteur de la santé. 39 pour cent de ce budget est destiné à l’achat de produits médicaux, 14 pour cent au personnel et sept pour cent seulement aux infrastructures. Les pays ayant des systèmes de santé performants consacrent jusqu’à 40 pour cent de leurs investissements au personnel et 33 pour cent aux infrastructures, selon le rapport de l’OMS.
Manque chronique de médicaments
La majorité des Africains dépend de services de santé publics. Ceux-ci sont sous-financés et ne fournissent pas aux populations la gamme de services dont elles ont besoin, tandis qu’une minorité a accès à des soins de qualité dans le secteur privé. Selon la Banque mondiale (BM), dans les pays à faible revenu, environ 80 pour cent de la population dépendent des établissements de santé publics pour leurs besoins médicaux.
Or, ces établissements souffrent, d’après l’OMS, d’un manque de disponibilité des médicaments essentiels et de ruptures fréquentes de stocks en la matière. Faute d’un accès rapide aux médicaments, vaccins et autres services de santé qui seraient à la fois appropriés et abordables, de nombreux patients africains meurent de maladies facilement guérissables, déplore l’agence onusienne.
En 2015, environ 1,6 million d’Africains sont morts du paludisme, de la tuberculose et du VIH/sida, les trois maladies qui font le plus de morts sur le continent. Le manque de ressources financières est la principale entrave à l’accès aux médicaments, selon l’OMS.
« L’accès aux médicaments » est défini par l’OMS comme le fait de pouvoir en disposer en permanence et à un coût abordable dans des établissements de santé situés à moins d’une heure de marche. L’Afrique ne fabrique que deux pour cent des médicaments qu’elle consomme. Même les pays qui en produisent, importent les ingrédients pharmaceutiques nécessaires à la fabrication de ces médicaments. Le continent importe, annuellement, pour 14 milliards de dollars de produits pharmaceutiques de l’extérieur, avait annoncé, en 2019, la CEA.