L’ éducateur en N’ko et tradi-thérapeute Nanfo Ismaël Diaby a récemment été interpellé et sanctionné par les autorités religieuses pour avoir dirigé une prière musulmane en langue locale Maninka-Kan. Vendredi dernier, un imam de la place l’aurait menacé de mort et au début de cette semaine il a été expulsé du local où il vend ses produits traditionnels. Notre rédaction l’a rencontré à son domicile privé au quartier Bordo ce 20 juin 2019.
Pour avoir dirigé une prière collective dans la langue de son terroir, le Maninka-kan, Karamô Ismaël Nabé a subit la colère des autorités religieuses et d’un certain nombre de citoyens de Kankan. En effet outre les différentes sanctions de la ligue islamique régionale de Kankan, il accuse l’imam de la grande mosquée du quartier Sogbè de l’avoir menacé de mort. « Suite à l’ampleur de la polémique suscitée, les sages nous ont convoqué à la grande mosquée. Ils nous ont formellement interdit cette pratique. Nous aussi, par respect pour eux nous nous sommes engagés à arrêter. Ensuite on a vu une tornade de sanctions s’abattre sur nous: interdiction de faire prier les gens, de prêcher la parole de Dieu à la radio et aux cérémonies religieuses. On n’a posé aucune objection. Malgré tout ça, le vendredi passé, plusieurs mosquées ont sermonné autour de l’affaire. Mais de tous ces sermons, celui qui a vraiment dépassé les bornes, c’est l’iman adjoint de la mosquée de Sogbè, Laye Mamadi Condé. Il a dit à la foule ce que Nanfo a fait, si on était au Nigeria, il n’allait pas le faire car ça lui aurait coûté très cher ».
Outré il explique sa compréhension de la religion notamment les prières :« Dans notre quête de connaissance du N’ko, nous nous sommes orientés vers la compréhension de la religion. Dans ce cadre, nous avons compris qu’il est idéal de faire la prière dans sa langue maternelle. Ceux qui s’y opposent ne présentent aucun verset du coran ni de hadith. Dieu a fait descendre le coran en langue Arabe. C’est vrai, mais il n’est écrit nulle part qu’il faut faire la prière en Arabe. Le prophète, paix et salut sur lui, nous a recommandé aussi de prier comme on l’a vu faire. Et justement on l’a vu prier dans sa langue maternelle qui est l’Arabe. Ce qui signifie que nous aussi, nous devons prier dans la nôtre. Cela ne devrait pas nous attirer tant de haine. »
Expulsé de l’échoppe où il vendait ses produits traditionnels Nanfo Ismaël DIABY est à la quête d’un nouveau local. il a exprimé sa détermination a continuer ses prières dans sa langue malgré toutes les sanctions: « les autorités religieuses ne m’ont pas interdit de faire mes travaux thérapeutiques. Elles m’ont dit de ne pas faire de prédications dans les lieux de prêche, ni de diriger des prières et d’interpréter le coran aux gens. Je suis d’accord. Ce sont mes supérieurs, je respecte leur décision. J’aime ma religion qui est l’islam. Mais je prierai mon Dieu dans ma langue jusqu’à ma mort. Ce n’est pas maintenant qu’on a débuté cela. nous faisons nos prières en Mninka-Kan depuis 1997 ».
Continuant son intervention, il reconnaît qu’avec cette pratique il ne fait point l’unanimité notamment à Kankan : « Je crois que bon nombre de personnes ne m’ont pas encore compris. D’autres par contre comprennent. Parce que je n’avance pas seul. Tous ceux qui ont appris et compris parfaitement le N’ko prient dans la langue de leur terroir. Dieu n’a dit nulle part dans le coran, qu’il n’accepte que les prières faites en Arabe ».
Ce sujet continu de défrayer la chronique à travers toute la ville du Nabaya.
Ibrahima Sory Keita pour laguinnéene.info