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Les femmes constituent plus de 50% de la population guinéenne et sont les plus impactées pendant des violences politiques. Au cours des périodes électorales (législatives et présidentielle) de 2020 et des déguerpissements de 2021, de nombreuses femmes se sont retrouvées démunies suite à la perte de leurs biens. Aujourd’hui elles peinent à joindre les deux bouts faute d’assistance.
Dame Bah est veuve et mère d’une fille de 14 ans. Le jour des élections législatives de 2019, elle a vu son restaurant partir en fumée à Sonfonia Cass et son rythme de vie basculer: « j’avais un restaurant que je venait de remplir de marchandises. Vers 6 heurs du matin, jour de l’élection législative, des bruits m’ont réveillé et j’ai dit à ma fille de se lever car je ne sais pas se qui se passe. J’ai constaté que des jeunes du quartier avaient fait sortir tout ce qu’ils voulaient avant de verser de l’essence dans le restaurant et les autres biens qui y restaient tels que des congélateurs ustensiles de cuisine, vêtements et meubles que j’avais rangé dans un coin en attendant que je finisse de déménager dans mon nouveau logement situé prêt du restaurant. Ma fille et moi sommes allées nous réfugier chez une copine. J’estime mes pertes à au moins 22 millions. J’y ait perdu toutes mes économies et depuis ce jour je n’arrive pas à me relever. Mais je remercie Dieu d’être toujours en vie. C’est ma copine qui m’aide pour la nourriture et autres petits besoins. Récemment elle m’a trouvé un matelas parce que je suis revenue à mon ancien logement vu que ma fille étudie dans cette zone. Elle doit passer son BEPC cette année et je ne voulais pas que ses études soient perturbées. »
Des cas de ce genre il y en a pas mal à travers le territoire national. D’aucuns souhaitent que l’État mette un fonds spécifique dans la ligne budgétaire du ministère de la justice pour assister les personnes ayant subi des préjudices politiques.
A cela viennent s’ajouter les victimes des casses de Février – Mars 2021 au cours des opérations de récupération des domaines de l’Etat et libération des artères publiques. C’est le cas de dame Keita au quartier Coronthie dans le centre ville de Conakry: « ils ont envoyé la machine qui a démoli une partie de notre concession à savoir une douche, une chambre et la véranda. J’ai trouvé un endroit où envoyer la famille et moi je suis auprès de ma grand mère en attendant. Ce n’est pas facile actuellement et je ne sais pas s’il y aura dédommagement. »
Des mesures devaient être prises avant de procéder à ces casses déplore Maitre Foromo Frédéric Loua, avocat et Directeur exécutif de l’ONG mêmes droits pour tous (MDT): « les femmes étaient en première ligne en terme de victimes parce que ce sont elles qui ont été déplacées dans les marchés, ce sont elles dont les boutiques ont été détruites et commerces saccagés et l’État n’a pour l’instant envisagé aucune mesure d’accompagnement pour apaiser un temps soit peu la souffrance de ces femmes là. L’ Etat certes a le droit de démolir mais en même temps il doit aussi se donner les moyens d’accompagner pour éviter que ces femmes ne vivent dans un dénuement total comme on le voit actuellement. L’ État a pris la décision d’aller détruire ces commerces sans un plan de construction, d’occupation et de suivi car des femmes sont de nouveau de retour sur les artères publiques à certains endroits. Je pense que cette mesure de démolition devait être précédée d’un acte préparatoire qui allait consister à recenser les commerces concernés. »
Malgré leurs maigres ressources le Directeur Exécutif de MDT compte mettre sur pied des activités pour assister quelques victimes de casse.
Hadjiratou Bah
Une initiative de la CONAREG et Sites of Conscience dans la troisième phase de son projet « prévention de la violence et consultations communautaires en Guinée.