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Depuis la libéralisation des ondes en 2006, la République de Guinée enregistre la création de plusieurs médias privés. Cependant, la liberté de la presse devient un sujet qui alimente les discussions. En Guinée, force est de reconnaitre que plusieurs journalistes travaillent ardemment pour relayer la bonne information, d’autres par contre sous la contrainte, sont obligés de se transformer en des communicants. Peut-on parler de liberté de la presse, quand les patrons de médias ne sont pas indépendants ?
Plusieurs entreprises de presse vivent de spots et bannières publicitaires et n’ont pas un fond de roulement. Ainsi, les patrons de médias ne dénoncent point par exemple un cas de corruption d’une entreprise de peur de perdre le marché avec cet annonceur. Même s’il faut en parler, le journaliste ne rentre pas en profondeur, c’est pourquoi d’ailleurs, le genre journalistique appelé ‘’ENQUETE’’ est dans les oubliettes. Les médias ne se contentent que des comptes rendus et reportages en petit format. Pour les grands reportages et investigations il faut débourser une forte somme, cependant certaines entreprises de presse ne peuvent pas acheter le matériel qu’il faut pour le personnel à plus forte raison assurer le transport.
Comment peut-on parler de la liberté de la presse en république de Guinée quand on sait que la plupart des journalistes n’ont pas un salaire décent ? Ceux-ci ne peuvent poursuivre un dossier, car leur investigation sera monnayée et ils vont naturellement accepter les pots de vin sachant bien qu’ils ne gagnent rien à la rédaction. Ayant des bouches à nourrir, ils sont tentés par les billets verts. D’ailleurs dans certains médias, quand un journaliste gagne des perdiems sur le terrain, le rédacteur en chef, le secrétaire à la rédaction et même le directeur général, l’attendent comme des chenilles à la rédaction pour partager le butin.
L’autre problème, à cause de la situation sociopolitique qui affecte le pays on taxe les journalistes de partisans. Quand un journaliste dénonce des tares que ça soit à la mouvance ou à l’opposition il est directement indexé par le camp adverse. Ce qui fait que plusieurs Hommes de médias sont interpellés à la Direction de la Police Judiciaire et certains sont mêmes mis en prison. Pourtant la loi organique L/002/CNT du 22 juin 2010 portant sur la liberté de la presse indique clairement que si un journaliste faillit à ses devoirs, il ne paie que des amendes mais ne doit en aucun cas être en prison.
Par manque de formations de certains journalistes et manque d’argent pour d’autres, la plupart des Hommes de médias sont devenus des communicants oubliant la tâche qui leur incombe à savoir la collecte, le traitement et la diffusion de l’information.
En outre, l’accès à l’information dans les administrations publiques est tout à fait un calvaire pour le pauvre reporter qui veut faire une investigation. Les départements n’appellent les journalistes que quand ils ont des conférences, des ateliers à organiser. Ils ne permettent pas à ceux-ci d’avoir des informations quand il s’agit d’une investigation.
Il faut reconnaitre tout de même que des associations de presse ont vu jour pour améliorer les conditions de travail des journalistes, à cela s’ajoute le syndicat de la presse privée de Guinée qui fait de son mieux pour que la convention collective soit effective en République de Guinée.
Pour cette journée de la liberté de la presse ce 03 mai, il faut au prime abord que les journalistes aient une bonne formation, connaissent les B-A-Ba du métier, l’éthique et la déontologie du journalisme. Ensuite que les patrons de médias paient convenablement leurs employés et pour cela il ne faut pas se lever un matin pour créer une entreprise de presse mais il faut avoir un fond de roulement. Ceci pour permettre aux journalistes de mener aisément sans contrainte des enquêtes ou des reportages grand format. Qu’il y ait l’accès à l’information dans les administrations publiques et que les associations de presse créent une synergie d’action afin d’aider les journalistes.
La Haute Autorité de la Communication HAC, le ministère de la communication doivent également s’impliquer pour l’épanouissement de cette couche sociale qui fait de son mieux pour alimenter quotidiennement les rédactions.
Enfin en cette période de COVID-19 j’inviterais les reporters qui sont les plus exposés à respecter les gestes barrières pour limiter la propagation de cette maladie.
Hassatou Lamarana Bah, journaliste-écrivaine, jeune entrepreneure