Confrontée à d’énormes problèmes de chômage et de manque de ressources pour faire face aux besoins les plus élémentaires , la jeunesse guinéenne qui représente la couche la plus importante de la population devient de plus en plus exigeante pour réclamer de changement dans la gouvernance afin d’améliorer ses conditions de vie. A ce titre, elle a payé un lourd tribu dans le combat pour l’instauration de la démocratie. Pour mieux affronter les défis du moment et participer activement à la transformation qualitative de la gouvernance, un nombre important de jeunes (hommes et femmes) s’est engagé en politique. Mais, le constat est que cet engagement au lieu de reposer sur une conviction solide fondée sur des valeurs et principes est plutôt motivé le plus souvent par la recherche d’avantages matériels ou privilèges. Il importe alors de se poser la question suivante « le manque de conviction politique de cette jeunesse représente-t-elle une limite à l’ancrage de la démocratie ? »
Le juge Louis BRANDEIS disait « Dans une démocratie, la fonction la plus importante, c’est celle du Citoyen ». Et la citoyenneté s’exprime à travers des valeurs comme le civisme, la civilité ou encore la solidarité. En d’autres termes, être citoyen implique des droits, comme le droit de participation à la gestion des affaires de l’État directement ou à travers ses élus et des devoirs, comme le devoir de respecter les lois et les décisions de justice de son pays. Ainsi, remplir sa fonction citoyenne nécessite un minimum de préparation pour chaque individu dont le soubassement est l’éducation politique et à la citoyenneté. En Guinée, en dépit du fait que c’est du devoir de l’État et des partis politiques de concourir à l’éducation politique des citoyens et de promouvoir le civisme et malgré la création d’un ministère en charge de l’Unité Nationale et de la Citoyenneté, les défis restent encore immenses en terme d’éducation à la citoyenneté. Le tout, dans un environnement où la société politique est marquée par la domination des discours à relents ethniques ou communautaristes à la place des débats axés sur des projets de société, des débats d’idées, des valeurs et principes qui caractérisent la société démocratique. A cela s’ajoute les effets pervers des réseaux sociaux, la course effrénée aux richesses et aux gains faciles, la pauvreté et ainsi que le faible niveau d’alphabétisation et d’instruction qui mine une masse importante de la jeunesse. Par ricochet, toutes ces situations ont contribué à polluer l’atmosphère politique se traduisant non seulement par une incapacité de la Jeunesse de contribuer à la qualification du débat politique mais aussi à épouser des attitudes ou comportements à même de contribuer à l’ancrage de la démocratie, gage de toute stabilité politique durable, du développement et de bonne gouvernance.
Ainsi, il a été constaté que pour la plupart du temps, les motivations qui sous-tendent les adhésions ou soutien aux partis politiques ou leaders politiques par beaucoup de jeunes étaient guidés par des raisons purement subjectives, essentiellement liées à l’appartenance à la même ethnie, à la même région ou encore pour des avantages pécuniaires ou matériels directs ou indirects. Cette situation est d’autant inquiétante qu’au cours de ces dernières années nous avons assisté à une montée en puissance des jeunes à la recherche des intérêts sous plusieurs formes. C’est le cas par exemple du phénomène des mouvements de soutien de jeunes et de communicants politiques qui ont inondés les espaces publics et les réseaux sociaux ces dernières années en Guinée. Les comportements et les messages véhiculés par ces deux groupes ont contribué non seulement à l’exacerbation des clivages ethniques mais aussi à la banalisation du débat politique affectant la bonne marche du processus démocratique du pays.
A quand la prise de conscience de la jeunesse guinéenne ? Elle doit pouvoir jouer pleinement son rôle citoyen pour la vitalité de notre démocratie, particulièrement en cette période de transition politique engagée par le Comité National du Rassemblement pour le Développement ( CNRD).
Alseny SALL, Activiste de la société civile